Sexualité épanouie en couple : Interview Sexologue Iv Psalti

Il y a peu de temps, j’ai eu la chance d’interviewer le Dr Iv Psalti pour lui poser des questions sur la sexualité dans le couple. Iv Psalti est sexologue, auteur, conférencier, chroniqueur et formateur en sexologie. Voici la vidéo de l’interview, ainsi que sa retranscription écrite, dans laquelle il nous livre ses conseils pour avoir une sexualité épanouie en couple.

Delphine : Bonjour Iv Psalti, j’aurais d’abord souhaité savoir pour quelles raisons principales les couples viennent-ils vous consulter en général ?

Iv Psalti : La raison principale est d’abord sexologique car je suis plus connu en tant que sexologue que thérapeute de couple. Néanmoins, ils vont venir avec un sujet bien spécifique. Il y a trois/quatre sujets bien spécifiques en sexologie.

Le premier motif de consultation est le manque de désir sexuel chez la femme et représente 50 % des cas.

En deuxième vient l’éjaculation précoce, en troisième la dysfonction érectile, en quatrième les douleurs pendant le rapport sexuel chez la femme et en cinquième le manque de désir sexuel chez l’homme. Quand on dit manque de désir sexuel chez la femme, ça englobe aussi les problèmes de plaisir et d’orgasme comme les anorgasmies chez la femme.

Je vois d’abord les gens seuls car j’ai besoin de connaitre certaines informations qu’ils ne me donneraient peut-être pas s’ils sont à deux. J’ai besoin de connaitre deux informations en sexologie : l’activité sexuelle globale de la personne et la présence d’un amant ou d’une maitresse.

L’activité sexuelle globale se compose de trois types d’activités : le rapport sexuel, la masturbation et les fantasmes.

Avoir des informations sur les rapports sexuels n’est pas suffisant pour nous, sexologues. On doit également connaitre les deux autres activités sexuelles : la masturbation et les fantasmes. La relation sexuelle, c’est la sexualité relationnelle. La masturbation et les fantasmes, c’est la sexualité personnelle.

N’oubliez pas que chez nous les occidentaux, européens, chrétiens, la première activité sexuelle – et de loin – c’est la masturbation et non la relation sexuelle. Je ne compte pas le fantasme car il est très difficile à quantifier. Les gens qui aiment le sexe, les sexophiles, ont une vingtaine de fantasmes par jour. Il est beaucoup plus facile de quantifier la masturbation et la relation sexuelle. Donc c’est cela qui va déterminer plus ou moins le désir sexuel d’une personne. Une personne sexophile, compétente sexuelle utilise les trois formes différentes de sexualité : la relation sexuelle, le fantasme et la masturbation. Si je souhaite voir les gens seuls, c’est justement pour avoir les données sur la masturbation et les fantasmes.

En consultation, on ne voit pas deux partenaires sexophiles. La plupart du temps, l’un est sexophile et l’autre ne l’est pas. La masturbation est taboue et on n’en parle pas. Quelqu’un qui vient me voir en me disant qu’il n’a pas de désir sexuel alors qu’il se masturbe tous les jours n’a pas de problème de désir sexuel. Pour moi, il a un désir sexuel puisqu’il se masturbe tous les jours.

La deuxième raison pour laquelle je vois les personnes seules, c’est pour savoir si ces personnes ont une vie parallèle. Si elles ont un amant ou une maitresse, je dois le savoir pour pouvoir les aider le mieux possible. Par exemple, Madame va dire qu’elle n’a pas de désir sexuel alors qu’elle se masturbe tous les jours et qu’elle a des rapports sexuels avec son amant trois fois par semaine. Mais devant Monsieur, elle me dit qu’elle n’a pas de désir sexuel alors qu’elle en a.

Dans ce cas-là, je vais d’abord travailler sur son désir sexuel à elle, donc sur sa sexualité personnelle. On va surtout travailler sur le fantasme et la masturbation avant d’aborder le problème de la relation sexuelle. Mais quelqu’un qui a plein de rapports sexuels en dehors du couple et qui se masturbe à longueur de journée n’a aucun problème. Je dois donc avoir cette information pour savoir sur quoi travailler.

Je vais ensuite travailler sur la question de l’absence de désir sexuel pour son mari. Par exemple, Michel et Micheline sont en couple depuis plusieurs années. S’ils viennent me voir c’est probablement parce qu’il y a un problème de couple, une conjugopathie. C’est donc là dessus que je dois travailler. C’est pour cela que je suis sexologue et en même temps je dois être thérapeute de couple. Il ne sert à rien d’être sexologue sans être thérapeute de couple et d’être thérapeute de couple sans être sexologue puisqu’on va démêler tout en même temps.

Je dois d’abord démêler la question de pourquoi Micheline n’a pas de rapports sexuels avec Michel. S’il y a des conflits, je dois apprendre à ces gens là à gérer leurs conflits. Les gens qui ne couchent pas ensemble, n’ont pas de rapports sexuels ne se touchent plus en général. Même si vous lisez dans les magazines que les gens qui n’ont pas de rapports sexuels peuvent bien s’entendre, avoir beaucoup de tendresse l’un pour l’autre, beaucoup d’affection, ce n’est pas la réalité.

Les gens en général qui ne couchent plus ensemble ne se touchent pas.

Donc avant de les mettre dans un lit pour qu’ils aient des rapports sexuels, ils doivent être capables de se toucher déjà habillés, de se prendre dans les bras, de se regarder dans les yeux. Parfois ils sont incapables de se regarder dans les yeux parce qu’ils ont souvent eu beaucoup de conflits. Donc on va d’abord leur apprendre à gérer les conflits et à se disputer. Se disputer c’est un art. Une fois qu’on leur a appris à se disputer et à gérer quelques conflits, on leur demande de se prendre dans les bras habillés et cela peut se faire devant nous.

Avant d’aborder la partie sexuelle sur les séances d’après, j’espère que les gens entre temps se sont masturbés suffisamment parce que qui ne se masturbe pas tue sa sexualité. Comme la masturbation est un tabou, ce sont des choses qu’on ne dit pas aux gens. Mais on doit leur dire « si vous n’avez pas de rapports sexuels, continuez au moins à vous masturber si vous ne voulez pas tuer votre sexualité, sinon vous vous tirez une balle dans le pied ».

C’est vrai qu’on lit et qu’on entend souvent que la masturbation va à l’encontre de la sexualité du couple !

C’est pour cela qu’on est là nous les sexologues. Notre travail, c’est l’éducation sexuelle des gens. On va casser le genre de tabous que sont la masturbation et les fantasmes en disant que la masturbation c’est très important. Parce qu’il y a des gens qui n’ont pas de rapports sexuels pendant un certain temps, certains pendant 6 mois, d’autres pendant 3 à 4 ans. Et puis, ils se disent que ce n’est pas grave de ne pas avoir de partenaire pendant 3 à 4 ans, que le prince charmant va arriver un de ces jours, qu’il va venir toquer à leur porte. Ils pensent qu’ils n’ont rien besoin de faire entre temps.

Mais les gens ne se rendent pas compte qu’ils tuent leur sexualité en ne se masturbant pas.

Ce qu’il se passe en réalité, c’est que le prince charmant arrive au grand galop, il est devant Madame qui ne va pas mouiller, son vagin va être tout sec, elle n’aura pas de désir sexuel et après elle va se demander ce qu’elle a fait de sa sexualité. « Madame cela fait des années qu’on vous le dit. Vous êtes en train de tuer votre sexualité, pourquoi vous ne vous masturbez pas ? Pourquoi n’avez-vous pas de fantasmes, pourquoi n’utilisez-vous pas votre corps ?  » Après elle va venir pleurer en disant qu’elle a tué sa sexualité. Mais cela faisait des années qu’on lui disait de se masturber.

Notre rôle en tant que sexologue c’est d’éduquer les gens à penser que s’ils n’ont pas de rapports sexuels mais qu’ils veulent continuer à avoir une sexualité par la suite, il faut qu’ils se masturbent.

C’est ça le plus important. Quand les gens sont seuls face à nous, j’ai ces informations là. Je dois voir si les gens ont des fantasmes, s’ils se masturbent, s’ils sont addicts à la masturbation, addicts à la pornographie. Parce qu’il peut y avoir des effets tout à fait contraires. Si une personne a une vie parallèle, et si Micheline par exemple s’éclate avec Joseph et que ça marche bien avec lui, pourquoi ça ne marche pas avec Michel ? Je dois essayer de voir pourquoi cela ne marche pas avec Michel. Je dois voir si ce sont les conflits qui génèrent quelque chose de négatif.

En fait, contrairement à ce que l’on pense, une femme n’a pas besoin d’aimer un homme pour pouvoir coucher avec lui. Une femme a besoin d’autre chose, que ce soit son mec depuis 50 ans ou bien un coup d’un soir.

Pour coucher avec un type, une femme a besoin d’une seule chose et ce n’est pas l’amour. Elle a besoin d’admirer son mec.

Le plus important c’est l’admiration. Si elle n’admire pas son mec, elle ne couche pas. La première raison pour laquelle une femme sexophile – qui continue donc à avoir une sexualité personnelle – arrête l’amour, c’est parce qu’elle n’admire plus son partenaire.

Et du coup, quel pourcentage de gens sexophiles y a-t-il dans la population ?

1/3 des gens sont sexophiles, 1/3 des gens sont sexophobes et entre les deux il y a les intermittents du sexe qui sont 1/3 aussi. Pour les intermittents, c’est un jour oui et un jour non, cela dépend : « si tu a été gentil, tu auras peut-être une récompense ! ». Ce sont des gens qui vont fonctionner et faire l’amour pour différentes motivations.

Le sexophile ne cherche qu’une seule chose dans la relation sexuelle. La chose la plus importante pour lui, c’est d’avoir du désir sexuel et la définition du désir sexuel, c’est obtenir le plaisir sexuel.

Vous avez beaucoup de personnes qui vont coucher non pas pour obtenir un plaisir sexuel mais pour avoir une relation, être en contact, pour que l’autre n’aille pas voir ailleurs, parce qu’elles sont passionnément amoureuses. La passion devient alors le moteur pour lequel les gens couchent.

Mais la passion dure de 3 à 6 mois, donc quand la passion est terminée, le sexe s’arrête. La majorité des couples vont dire que tout allait très bien dans leur couple pendant les 5-6 premiers mois, ils faisaient souvent l’amour et depuis ils ne le font pratiquement plus. Pourquoi ? Parce que ces gens là ont utilisé la passion comme moteur de leur désir sexuel. Quand la passion se termine, il n’y a plus de désir sexuel. Donc c’est un mauvais moteur.

Il faut donc trouver un autre moteur pour retrouver une sexualité ?

Pour une sexualité épanouie sur le long terme, il n’y a qu’un seul moteur viable, c’est vouloir obtenir du plaisir sexuel.

Le sexe c’est d’abord pour soi, pour son propre plaisir. Quand il n’y a pas cela, les gens sont étonnés que d’un coup le désir sexuel parte. Ils ont fait 10 couples, 15 couples dans leur vie et à chaque fois les 5-6 premiers mois tout marchait bien et cela s’arrêtait brutalement. Et pourquoi le sexe ne marche plus ? Parce que le moteur est mauvais.

Le seul moteur qu’ils n’ont pas utilisé est le moteur qui marche. Ils ont utilisé le moteur de la passion, de la bonne relation. Mais le sexe ce n’est pas ça. C’est pour obtenir du plaisir. Donc les gens utilisent différentes motivations, et c’est ça qui va déterminer si les gens vont tuer leur sexualité ou non. Pourquoi n’y a-t-il qu’un tiers de sexophiles ? Les sexophiles savent qu’ils vont faire l’amour pour obtenir du plaisir sexuel. Je ne dis pas qu’on est sexophile toute sa vie.

Peut-il y avoir des changement au niveau de la sexualité au cours de la vie ?

Vous savez tout le monde peut être touché par un manque de désir sexuel. Il suffit que les enfants soient malades, qu’on perde notre emploi, qu’on ait des problèmes d’argent et on a plus la tête au sexe. D’autres choses vont prendre le dessus et le désir sexuel va diminuer. Mais espérons que ça n’arrive que pendant un court laps de temps. Parce que sinon cela peut durer jusqu’à la fin de la vie. Et c’est souvent ce qu’il se passe. La plupart des gens ne savent pas reprendre parce qu’ils ont abandonné la sexualité. Ils ont abandonné toute forme de sexualité pendant trop longtemps, ils se savent plus retrouver la sexualité et ils se demandent pourquoi cela ne marche pas.

Si vous n’avez pas de sexualité relationnelle, Madame si nous n’admirez pas votre mec parce qu’il a fait une erreur, il faut au moins se masturber. Parfois, c’est aussi la faute des femmes.

L’erreur universelle, c’est que les femmes mettent leur mec sur un piédestal.

Mais il ne faut pas faire cela, le mec doit être mis au même niveau. Parce que dès qu’il fait une bêtise, il descend immédiatement du piédestal.

La plus grande bêtise étant que Monsieur se fasse marcher sur les pieds au boulot par son patron et qu’il pleure auprès de Madame en disant que son chef a été méchant. A ce moment-là, le piédestal se fracasse et le sexe s’arrête. Monsieur est tout étonné et se demande pourquoi il n’y a plus de sexe. Il a fait une grosse erreur en racontant à sa femme comment son chef lui marchait sur les pieds. Une femme a horreur qu’une autre personne, à part elle-même, marche sur les pieds de son mec. Monsieur se mord les doigts par rapport à cette erreur et se demande comment il va pouvoir arranger cela.

Quand on découvre cela, on va pouvoir travailler avec le couple. Si on voit que le problème majeur c’est l’admiration, que l’admiration de Madame vis à vis de son homme a diminué, on commence par apprendre à Monsieur à ne jamais raconter ce qu’il se passe au boulot à sa femme. Car il donne une information à sa femme mais elle n’est pas capable de recevoir cette information. Il peut me dire que c’est sa femme qui le fait parler à chaque fois qu’il rentre de la maison, qu’elle lui dit qu’il ne parle pas beaucoup, qu’il n’y a pas assez de communication entre eux. Les femmes demandent parfois des choses aux hommes, elles posent des questions mais elles ne sont pas capables de recevoir les informations contenues dans les réponses.

Il ne faut jamais poser de questions si on est incapable de recevoir toutes les réponses. Sinon, c’est se tirer une balle dans le pied. Tu demandes une info que tu ne sais pas gérer et ton mec descend de son piédestal. Les deux ont fait une erreur, elle de lui demander de parler de son boulot et lui de lui raconter ce qu’il s’est passé au boulot. Ce n’est pas à sa femme qu’il doit raconter ce genre de choses. Dans la relation amoureuse, l’admiration de la femme est très très importante et c’est universel. Dès que l’admiration s’en va ou diminue, le sexe risque de diminuer voire de s’arrêter complètement. Les hommes se plaignent qu’il n’y plus de sexe alors qu’ils ont fait l’erreur de trop en dire.

Et du coup, est-ce possible de raviver le désir dans un couple et comment s’y prendre ?

Il faut déjà connaitre le sujet, savoir pourquoi il y a ce manque d’admiration. Disons que l’on reste dans l’exemple précédent et que le manque d’admiration est dû au fait que Monsieur se fait marcher sur les pieds par son patron. D’abord, l’homme ne doit plus raconter ses mésaventures au travail, celles qui le desservent et le dévalorisent à sa femme. Ensuite, s’il réussit à s’affirmer face à son patron, qu’il le raconte en large et en travers à sa femme.

Et puis, il faut trouver d’autres domaines dans lesquels il est un homme admirable. Pas seulement dans le domaine du boulot mais aussi dans le fait de faire certaines choses à la maison ou avec ses enfants par exemple, pour que l’admiration de sa femme monte. Il s’agit de compenser le manque d’admiration. Mais c’est au couple de donner ces informations au sexologue pour qu’il puisse identifier les causes de l’absence de désir sexuel, il ne peut pas le deviner tout seul.

Et si l’arrêt de la sexualité n’est pas lié à un manque d’admiration mais à des changements hormonaux ou à des évènements comme un grossesse ou un accouchement, comment faire ?

La sexualité peut diminuer au moment de la grossesse, de l’accouchement et surtout au moment de l’allaitement. Ce sont des moments critiques du couple où le désir sexuel peut diminuer biologiquement. Normalement, dans la grossesse le désir sexuel de la femme ne diminue pas car elle a beaucoup d’oestrogènes et d’oestradiol. Ces hormones sont des moteurs de sa sexualité et elles peuvent être aussi fortes que la testostérone. Elle a aussi des niveaux de testostérone élevés. Son corps change et les changements peuvent l’aider à aimer davantage son corps. Par exemple, une femme qui a une petite poitrine au départ aimera davantage son corps avec une poitrine plus grosse et améliorera ainsi son image corporelle. Il est bien connu qu’une femme fonctionne beaucoup à l’image corporelle.

Une femme qui a une bonne image corporelle a une bonne sexualité. Si elle a une très mauvaise image corporelle, elle a une sexualité exécrable ou bien elle n’en n’a pas du tout.

Ainsi, elle peut améliorer son image corporelle avec la taille de sa poitrine. Donc normalement pendant la grossesse, il n’y a pas de problème concernant la sexualité. Sauf si la grossesse est très attendue, c’est à dire que le temps d’infertilité du couple a été long. Ils ont fait beaucoup de traitements, ils ont eu recours à la PMA (procréation médicalement assistée), fait des FIV par  exemple. Du coup, au moment où elle va tomber enceinte, elle va prendre cette grossesse comme une grossesse sacrée. C’est à dire que cette grossesse va avoir une valeur énorme et elle va avoir peur d’avoir des relations sexuelles, peur de faire une fausse couche et de perdre cet enfant tant désiré et attendu.

C’est une des raisons qui peut faire que la sexualité s’arrête au moment de la grossesse. Cela dépend aussi du fait qu’elle était ou non sexophile avant la grossesse. Une femme qui était sexophobe avant la grossesse va évidemment arrêter la sexualité. La grossesse est une aubaine pour elle. Les sexophobes (1/3 des femmes) ont un seul but dans leur vie, c’est d’arrêter la sexualité. La grossesse est une occasion en or et la femme va dire à son mec qu’une femme enceinte ne fait pas l’amour, n’a pas de relations sexuelles.

Et y a-t-il plus de femmes sexophobes que d’hommes sexophobes?

Il y a plus de femmes sexophobes. Dans le 1/3 des gens sexophobes, il y a plus ou moins 25% de femmes et un peu moins de 10% d’hommes. Donc il y a beaucoup plus de femmes.

Et comment se fait-il qu’il y ait plus de femmes, pourquoi ce cliché selon lequel les hommes aiment davantage la sexualité que les femmes?

Et bien cela change, donc avant on avait moins de 3% de sexophobes et puis avec les années c’est devenu 5%. Dans certains pays, certaines régions, c’est entre 5% et 10%. Les sexophobes sont des gens qui n’aiment pas le sexe, qui n’ont pas de désir sexuel. Ce ne sont pas des gens qui ont une aversion envers la sexualité. Ils n’ont simplement pas de désir.

Donc le sexophile, c’est celui qui a du désir sexuel et le sexophobe c’est celui qui n’en n’a pas.

Le but du sexophobe est de ne pas avoir de relations sexuelles. Un vrai sexophobe ne veut pas avoir de sexualité personnelle non plus. Et tout au bout des sexophobes, à l’extrémité, il y a les asexuels. C’est ceux qui ont décidé de ne pas avoir ni de relations sexuelles, ni de masturbation, ni de fantasmes. Ils arrêtent toute forme de sexualité, les 3 formes de sexualité.

Vous dites qu’ils décident d’arrêter la sexualité, c’est donc un choix de leur part ?

C’est un choix du genre « j’ai essayé la sexualité, je me suis masturbé, j’ai couché par-ci par-là, je n’ai obtenu aucun plaisir, je lis dans les livres que les gens obtiennent un plaisir, un orgasme, moi je n’ai jamais connu cela, je ne suis pas intéressé par le sexe ». C’est comme un vin qu’on vous oblige à boire parce que tout le monde le fait. Vous allez boire du vin parce qu’on est dans un certain contexte social. Vous allez boire parce qu’on vous dit qu’il le faut mais à un moment donné, vous allez dire « basta, moi j’ai gouté le vin, j’ai bu le vin mais ça ne m’intéresse pas donc j’arrête le vin ».

Le sexe c’est exactement la même chose donc il ne faut pas placer la sexualité comme quelque chose d’extraordinaire. Les gens essaient, ils voient que ça ne leur donne pas de plaisir, que ce n’est pas intéressant, que ça prend beaucoup de temps, beaucoup d’énergie et qu’on a d’autres choses à faire dans la vie. Donc il faut comprendre les sexophobes, il faut les respecter. Mais le problème c’est que les sexophobes ne respectent pas les sexophiles. N’oubliez pas que l’on vit dans un monde sexophobe depuis des siècles et cela n’a pas changé. La révolution culturelle n’a pas fait changer cela.

Et pourquoi dites-vous que l’on vit dans un monde de sexophobes ?

La majorité des gens qui font les lois, qui font l’éducation sexuelle dans les écoles sont sexophobes. Vous savez que dans l’éducation sexuelle on ne parle ni de fantasmes, ni de masturbation. Or c’est la seule sexualité qu’ont les jeunes. Pourquoi on n’en parle pas ? Parce que ceux qui bâtissent l’éducation sexuelle, ce sont des sexophobes. Les sexophobes sont des gens très militants qui n’ont qu’un seul but : convaincre les autres que la sexualité n’est pas bonne, qu’il ne doit pas y avoir de sexualité avant le mariage, que ça donne des grossesses, des microbes, et qu’il y a des tas de violeurs et de pédophiles.

Dans la majorité des pays, l’éducation sexuelle est faite par des sexophobes.

Les censures des films, des magazines, des affiches dans la rue, sont faites par des juges qui sont sexophobes. On vit dans un monde de sexophobes. Ils disent qu’on voit le sexe partout, qu’il est affiché partout, ils voient du sexe partout, sur une publicité de soutien gorge par exemple. Mais comme ils n’aiment pas le sexe et que ce n’est pas leur truc, ils vont voir du sexe partout. Ils vont dire qu’on vit dans une société de débauchés.

Ce sont principalement les femmes sexophiles qui me disent qu’on vit dans un monde de sexophobes. Leur principale plainte étant qu’elles ne peuvent pas parler de sexe librement. Dans la série américaine Sex and the city, c’est 4 nanas qui sont amies et qui parlent de sexe sans arrêt ensemble. Mais ça n’existe pas dans la réalité ou peut-être entre deux ou trois personnes.

Par exemple, une femme d’une quarantaine d’années qui est invité dans une réunion avec d’autres femmes. Vous pensez qu’elle peut dire « ah hier je me suis faite sodomisée, qu’est-ce que c’était bon !  » ou « ah moi hier j’ai sucé mon mari et qu’est-ce que c’était bon ! » Si elle dit un truc comme ça, elle va être fusillée par les autres et être stigmatisée comme étant une salope.

Une femme qui dit « hier mon mari a voulu me sodomiser et je lui ai donné un coup de coude « , tout le monde va l’applaudir et lui dire qu’elle a bien fait. Pourquoi ? Parce qu’on vit dans un monde de sexophobes. Le monde n’est pas du tout sexophile même si on vous le fait croire. Les gens qui disent qu’on parle tout le temps de l’orgasme dans les magazines, qu’on nous oblige à avoir des orgasmes, qui dit cela ? Des sexophobes. Une femme sexophile qui a un orgasme ne va jamais parler de cela dans les magazines.

Je vois aussi cela dans les émissions radio. Je fais des émissions radio où les gens envoient leurs questions, et je réponds en direct aux questions. Dans chaque émission, j’ai toujours un ou deux sms ou mail – sur des centaines – de gens qui disent « vous parlez encore de saloperies, vous n’avez rien d’autre à faire, est-ce que c’est l’heure de parler de ça, il y a d’autres sujets bien plus intéressants ». Vous n’allez pas me dire que ce sont des sexophiles qui tiennent des propos comme ça. Les sexophobes sont partout, ils sont militants et ils ne respectent pas les sexophiles.

Ce que je dis aux sexophiles, c’est de respecter les sexophobes mais ils me disent que les sexophobes ne les respectent pas. Nous en tant que sexophiles on ne peut pas aller quelque part et dire que le sexe c’est bon. C’est bon pour la santé, un orgasme c’est bon. On n’arrive pas à dire ça. On n’arrive pas à parler de masturbation, de fellation, du cunnilingus, de la sodomie, on est fusillé dès qu’on en parle. Pourquoi ? Parce qu’on est dans un monde de sexophobes. Et nous autres, on doit pouvoir dire « attention les sexophobes ont pris trop de pouvoir » et on doit pouvoir les stigmatiser pour casser ce pouvoir. Donc c’est aussi notre rôle en tant que sexologues de dire que les sexophobes sont là.

Et par rapport à l’infidélité, est-ce forcément des sexophiles qui sont infidèles ou y a-t-il d’autres raisons qui poussent les couples à être infidèles?

J’adore cette question. Je vais vous donner un exemple. Je vais parler de Joseph et de Joséphine. Joseph est sexophile, Joséphine est sexophobe. Donc cela fait des années que Joseph veut de la sexualité mais qu’ils ont abandonné toute forme de sexualité à deux. C’est une situation que j’ai rencontrée plusieurs fois dans la vie. Joseph vient en cabinet et se plaint que Joséphine a été voir ailleurs. Dans la tête d’un homme, quand on a une femme sexophobe, on peut dormir sur ses deux oreilles car on est sûr qu’elle ne va pas nous tromper.

Pourquoi un homme va tromper sa femme et être infidèle ? Il y a deux raisons majeures : plus de 80% de toutes les raisons qui existent sont dans ces deux raisons. La première raison est le manque de quantité sexuelle. Comme il a très peu de rapports sexuels à la maison, il a besoin de sexualité et va donc voir ailleurs une femme professionnelle ou non professionnelle. La deuxième raison pour laquelle un homme va voir ailleurs, c’est le manque de qualité, c’est à dire le manque de fantaisie. Il veut une fellation, Madame ne lui fait pas de fellation, ou une sodomie, ou se faire sodomisé ou des petits jeux de domination-soumission que Madame ne veut pas lui donner. Il va donc aller chercher cela ailleurs. Donc ce sont les deux raisons majeures qui poussent un homme à l’infidélité sexuelle.

Ce qui pousse un homme à être infidèle, c’est majoritairement le sexe. Soit c’est le manque de rapports sexuels, soit le manque de fantaisie sexuelle.

Comme pour lui, dans sa tête d’homme, on va voir ailleurs pour du sexe, une femme sexophobe ne va jamais aller voir ailleurs. Alors il est tout étonné d’apprendre que sa femme est allé voir ailleurs. Joséphine n’a pas été chercher du sexe mais autre chose. Pourquoi une femme va aller voir ailleurs ? Quelles sont les raisons qui poussent une femme à l’infidélité ?

Il y a deux raisons qui poussent une femme à être infidèle : l’indifférence de son mari et la recherche de la passion.

La première raison pour laquelle une femme va voir ailleurs, c’est parce que son mari ne la regarde pas, qu’elle se sent transparente pour lui et elle a envie de sentir le désir chez un homme. La deuxième raison, c’est la recherche de la passion. La passion est une émotion qui nous fait vibrer. La femme a déjà vécu ça, connu cette émotion quand elle était jeune. Elle a déjà été passionnément amoureuse de quelqu’un. La vie qu’elle a avec son mari aujourd’hui, c’est du train-train, elle ne vibre plus et ne ressent plus d’émotions fortes. Elle va donc rechercher cette vibration et va aller coucher avec un homme pour retrouver cette vibration.

Si c’est une vraie sexophobe, elle va aller coucher une ou deux fois et puis plus rien. Si elle est sexophobe, il faut qu’elle tombe sur un amant sexophobe aussi, sinon il va lui demander plus de sexe. Mais cela ne l’intéresse pas et elle va dire non. Donc il y a des femmes sexophobes qui ont des dizaines de relations avec des hommes et elles ont toujours la même plainte « les hommes ne pensent qu’au sexe, à faire l’amour, j’en ai marre des hommes, je veux autre chose, la main dans la main, les yeux dans les yeux ».

En fait, ces femmes veulent une belle histoire romantique, c’est de ça dont elles ont besoin. Le problème c’est que les hommes mariés avec qui elles entretiennent une relation sont là à cause d’un manque de sexualité dans le couple. S’ils ont une maitresse c’est pour avoir du sexe. Ils ne vont donc pas s’entendre car elles ne veulent pas de sexualité. Ils vont coucher ensemble deux ou trois fois. Si elles sont passionnément amoureuses, peut-être vont-elles accepter la sexualité pendant un certain temps. Donc la passion va être le moteur de la sexualité et puis cela va se terminer car la passion va s’éteindre et elles vont changer de partenaire.

Il y des femmes qui viennent me voir et qui ont eu – en l’espace de 10 ans – 30 ou 40 partenaires en parallèle de leur mari. Elles me disent que tous les hommes sont des obsédés, des pervers sexuels et qu’ils ne pensent qu’à la sexualité. Voila donc les deux raisons. Pour répondre à votre question, une femme sexophobe est tout à fait capable d’être infidèle mais ce ne sera pas pour le sexe. On ne va pas forcément voir ailleurs pour le sexe.

Dans une relation, il y a trois ingrédients : l’amitié, le sentiment amoureux et le sexe.

Soit on va chercher les trois dans une relation, soit celui qui manque à la maison. Si à la maison elle a le sexe car son mari ne pense qu’à cela, elle va aller chercher à l’extérieur le sentiment amoureux, la passion qui s’est éteinte avec son mari. L’homme va la plupart du temps chercher le sexe.

Il y a des femmes qui, pour faire plaisir à leur mari et pour ne pas qu’il aille voir ailleurs, vont être tenté de se forcer ou de céder à ses fantasmes et ses envies. Comment faire quand certains fantasmes ne sont pas partagés ?

Je suis un homme de terrain et je vais souvent à la rencontre des gens pour me rendre compte du comportement sexuel. Les femmes qui n’aiment pas le sexe et qui se forcent à avoir des relations sexuelles pour ne pas que leurs maris aillent voir ailleurs ne représentent qu’un tout petit pourcentage. Une femme qui arrête complètement le sexe représente un bien plus grand pourcentage. Donc les femmes dont vous me parlez ne sont pas nombreuses, elles représentent une minorité par rapport aux autres.

Le devoir sexuel est terminé, c’était à une certaine époque. Les femmes avaient des obligations envers leurs maris et elles avaient des rapports sexuels par devoir. C’est quasiment terminé. Sauf dans certains cas religieux ou ça existe encore. Une femme qui n’a pas envie aujourd’hui ne fait rien pour garder son mari. Donc la minorité de femmes qui se forcent ont de fortes chances que leur mari n’aille pas voir ailleurs.

Le secret d’un couple heureux et d’une sexualité épanouie, serait-ce un couple de deux sexophiles ou de deux sexophobes ?

Oui mais la majorité des couples ne sont pas comme ça. Les couples avec deux partenaires sexophiles représentent 5 % des couples et on ne les voit pas en consultation. Les couples avec deux sexophobes représentent aussi 5% des couples mais la majorité ce sont des sexophiles et des sexophobes ensemble.

Mais du coup comment fait-on pour s’accorder et s’entendre ?

On voit ce que chacun est capable de remettre en question et on travaille dessus. Etre sexophile, ce n’est pas déterminé à l’avance, ce n’est pas inné et c’est ouvert à tout le monde. Pour devenir sexophile, il faut être curieux et motivé et se dire que le sexe c’est pour nous, pour notre propre plaisir. Parce que faire le sexe pour l’autre, pour lui faire plaisir, pour qu’il n’aille pas voir ailleurs ça marche un certain temps mais ça retombe très vite. Cela ne fonctionne pas sur le long terme. Donc tant qu’on n’a pas intégré qu’on fait le sexe pour nous, on ne peut pas devenir sexophile.

Donc pour s’épanouir sexuellement il faut vraiment le faire pour soi et ne jamais se forcer.

Absolument il faut le faire pour soi.

Du coup où peut-on vous retrouver ?

Aller sur mon site www.sexualitepositive.com, toutes mes informations sont sur ce site. Pour les formations pour professionnels, c’est le site avec Yvon Dallaire www.fpsp.eu. J’ai aussi une newsletter où il y a des articles réguliers et très intéressants faits par moi et d’autres personnes qui connaissent bien leur sujet sur la sexualité positive. Il suffit de s’y abonner sur mon site.

Je vous remercie beaucoup pour cette interview.

Merci à vous.

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